Je travaille en France depuis 5 ans dans un cabinet existant depuis une vingtaine d'années avec une moyenne de 1 radiologue et 1 manip, eh bien je peux dire que cette synergie n'est possible qu'avec des conditions particulières en ces temps de "crise" :
- La confiance doit être totale entre le médecin et le manip, des concessions doivent être faites des 2 cotés et la polyvalence des fonctions doit être encore plus que complémentaire, elle doit empiéter l'une sur l'autre afin de combler d'éventuels manques qui risquent fatalement de subvenir.
Exemple de geste anodin important : le radiologue doit savoir utiliser le matériel informatique et manipuler les logiciels de gestion d'image rx, irm ou tdm, voire même être capable de se débrouiller dans des tâches "ingrates" habituellement réservée au manip voire même à la secrétaire (plantage d'ordi ou d'imprimantes).
Il doit avoir des notions "administratives" pour répondre directement aux questions de patients genre "ça coute combien un sinus pour mon gamin de < 4 ans?" ou leur expliquer que le système du Tiers Payant ne s'applique pas à leur mutuelle car il n'y a pas de contrat signé entre lui et leur caisse et qu'ils n'ont déclaré leur médecin traitant que le matin même...
Pour le manip c'est pareil, il doit connaître suffisamment son "patron" pour anticiper les clichés, les formatages et les impressions, préparer à l'avance le matériel d'examen sans que "le patron" n'ait à le faire (mammon, hystéro, uro, togd, arthro...) et veiller aux stocks à la fois médical et informatique tout en étant capable d'épauler les secrétaires pour la CCAM voire même les comptes rendus...
- J'ai eu la "chance" de voir évoluer ce cabinet de l'analogique au numérique et il y a 2 contraintes importantes pour un petit cabinet médical : l'investissement dans le matériel et les normes.
Il y a 10-20 ans, il était toujours possible de se la jouer Mac Guyver et de bricoler un peu sur des machines ancestrales achetées en occasion, mais maintenant il est extrêmement difficile de le faire avec l'évolution des normes qui petit à petit bouffe ce même marché (un exemple typique est le mammographe qui doit maintenant être en automatique si encore analogique, rayant de la liste les anciens modèles).
L'investissement lourd est alors inévitable, sans compter qu'il est quasi impossible de s'acheter un scanner à moins d'être au conseil de l'ordre local, il va falloir planifier très loin dans le temps, et donc même planifier la position de son cabinet par rapport à la concurrence avec une étude de marché. C'est un peu froid mais il va falloir "optimiser" ses patients en clientèle, au pire des cas transformer sa patientèle en usine à vache pour être rentable les 1ères années...ou alors traiter ses patients comme Dr House et n'en faire qu'une vingtaine par jour ce qui se ressent dans le chiffre d'affaire et la facture des mises aux normes qui elle n'est pas variable mais obligatoire et régulière.
- L'investissement est également important au niveau physique et moral, au privé il ne faut pas se tourner les pouces lorsqu'on n'est que 2 en moyenne en opérationnel, et la "récompense" de cet investissement n'est en général offerte qu'une dizaine d'années plus tard, sauf si l'une des 2 personnes fait un surmenage ou un avc, c'est très long, c'est très dur et c'est pire que l'armée (difficulté de trouver un remplaçant potable à cause de la synergie donc peu de vacances, gérer/subir les crises possibles entre personnel médical...). En parlant de personnel médical, la présence au minimum d'une secrétaire compétente, capable de gérer les patients, la CCAM, les caisses et leur éternels rejets de FSE, les comptes rendus, la gestion des stocks devient quasiment indispensable mais malheureusement ce genre de personnel idéal n'existe pas et c'est à la polyvalence du radiologue et du manip de compléter le reste (qui doit également se former au jour le jour vu les évolutions paramédicales administratives).
Y en a encore qui veulent faire du duo en privé? Non? Eh bien la solution de facilité vient d'associations entre radiologues ou intégrer un pôle sanitaire ou encore de faire des remplacements. Le seul souci est que la synergie entre radiologue en association est toujours difficile à moins de bien se connaitre, et que l'intégration d'un pôle passe par l'achat de part et de quota qui vous transforme en esclave parce que vous êtes le dernier arrivé. Ou alors c'est un CDD et c'est direction le CHD qui fait tourner le personnel pour faire des économies...
Ceci dit, si on est motivé, une telle association est toujours bénéfique (surtout pour le manip) si on sait mettre un peu son ego de côté et on apprend beaucoup de choses si le radiologue est bon. C'est une décision assez difficile car cela implique que le manip doit se "poser" un bon moment et perdre l'expérience qu'il peut acquérir et papillonnant de cabinets en hôpitaux, se condamnant à rester dans le diagnostic....
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